Jean-Luc Barnabet: Restaurateur
[:fr]IRANCY EN BOURGOGNE ET JEAN-LUC BARNABET.

Les vins de l’Auxerrois ont une longue histoire. Le fameux cépage César a laissé ses traces, depuis
l’époque romaine sur le site archéologique d’ Escolives-Sainte-Camille ( une frise sculptée du
deuxième siècle montre un vendangeur travaillant sur un cep de vigne, probablement du César ) ;
ce même cépage reste encore à ce jour une spécificité des vins d’Irancy.

Très vite et tout au long du Moyen Age, la rivière Yonne est rendue navigable et permet le grand
essor commercial des vins de l’Auxerrois. La réputation grandit mais le succès n’apporte pas que
des avantages ; on plante beaucoup et partout dans l’Auxerrois en préférant les cépages à gros
rendement. Au XVIII ème siècle, les vins rouges très demandés deviennent médiocres et bon mar-
ché, puis le phylloxéra viendra finir de ruiner ce que la crise et la concurrence avaient déjà bien
entamé.

Ce n’est qu’au XX ème siècle que le vin d’Irancy va retrouver progressivement de la qualité ; en
particulier grâce à un lieu dit réputé, Palotte, grâce aussi à l’implantation majoritaire du Pinot noir sur ses meilleurs terroirs. Quant au César, il est préservé même si c’est en très petite quantité.

De l’appellation « Bourgogne Irancy » en 1977, cette longue quête qualitative va mener la com-
mune à sa consécration en 1999 avec l’accession à l’AOC communale d’ « Irancy ».
C’est précisément l’époque où j’ai découvert cette région, lorsque je me suis installé à « La Petite
Auberge » de Vaux avec mon épouse Mary en 1979.
L’Irancy était le vin le plus vendu de ma carte. Il faut dire que j’avais des relations privilégiées avec
quelques viticulteurs, ce qui me permettait de proposer une très belle panoplie de l’appellation,
et aussi un bel éventail de millésimes anciens. L’Irancy ne craint pas de vieillir un peu !

J’utilisais aussi l’Irancy en cuisine, pour réaliser une sauce au vin qui obtenait un grand succès avec
la meurette d’escargots, le rognon de veau rôti dans sa graisse ou la pièce de bœuf ; je faisais aussi
pocher mes figues avec des épices pour accompagner le canard sauvage, ou simplement en des-sert avec des fruits d’automne. Je faisais également une vinaigrette spéciale avec les lies fines afin
d’obtenir douceur, couleur et onctuosité ; donnant un excellent accord avec la salade de pieds de
cochon gratinés.

Tout au long de ces années, je n’ai cessé de voir progresser cette appellation. De Père en Fils et
au fil du temps, le travail du sol s’améliore , la vinification est plus précise, même, les conditions climatiques s’y mettent pour l’obtention d’une bonne maturité. En outre et comme souvent, la concurrence me semble très positive au final ; surtout dans ce contexte où nous observons que beaucoup de viticulteurs travaillent sur plusieurs parcelles de différents terroirs. Si hier, l’Irancy était surtout un assemblage mariant globalement toutes les nuances d’expression, aujourd’hui, une tendance s’accentue ; celle de vinifier séparément les parcelles bien définies, Palotte évi-
demment mais aussi bien d’autres, Mazelots, Côte du Moutier, Paradis, Cailles etc… /…
Jusqu’où faut-il aller et faut-il officialiser les crus au risque d’affaiblir les cuvées moins réputées ?
Si le culte de l’excellence est positif dans l’ensemble, il peut aussi faire apparaître par contrecoup
quelques limites. Le prix moyen doit être justifié sur l’ensemble de l’appellation et c’est l’ensem-
ble de l’appellation qui doit être reconnu et apprécié au final.
Le débat et l’histoire continuent à Irancy.
Jean-Luc Barnabet, le 27 juillet 2015
http://www.jlbarnabet.com/[:en]IRANCY AND JEAN-LUC BARNABET.

The wines of the Auxerrois region of Burgundy have a long history. The famous César grape variety so synonymous with the region has left its trace. In the roman remains of the village of Escolives-Sainte-Camille, only a few kilometres from Irancy, one can see a sculpted frieze showing a figure working on a vine. Most probably César. The very same grape variety remains today part of the uniqueness of the Irancy AOC.

During the midde ages the river Yonne became navigable and the wines of the region saw a rapid expansion of their commercial market. Reputation and success followed. However, success does not always all bring only advantages. The huge demand saw an increase in planting throughout the Auxerrois region with a focus on larger yielding varieties. By the 18th century the wines, previously so much in demand, had become mediocre and cheap. In the late 19th century the phyloxera crisis added to this situation putting an end to much of the production in the region.

It is only in the 20th century that the wines of one village, Irancy, start progressively to re-find their quality and in particular thanks to one parcel of vineyard known as ‘Palotte’. Thanks also to the plantation of mainly Pinot Noir. The grape variety César remained but only in very small quantities.

The long quest for quality in Irancy led it from a regional ‘Bourgogne Irancy’ in 1977 to the accordance of AOC Village status in 1999: Appéllation Irancy Contrôlée.
It was at this time that I discovered this region when my wife Mary and I opened our restaurant ‘La Petite Auberge’ in the neighbouring village of Vaux.

Irancy was the best seller on my wine list. I have to admit that I was lucky enough to be on very good terms with several wine producers which allowed me to offer a large selection of Irancy wines and several older wines. Irancy wines have no problem with ageing!

I also used Irancy extensively in my recipes. The red wine sauce accompanying my burgundy snails in a meurette sauce was a great success as was my roasted veal livers. I also used Irancy to poach figs in spices to accompany wild duck or simply to serve as a dessert with autumn fruits. I also used the lees to make a sweet and thick deeply coloured vinaigrette to accompany a gratin of pig’s foot salad.

Throughout the years I have seen Irancy wines progress. From father to son and over time, the work in the vineyards has improved. Vinification methods have become more precise and climatic change has helped in improving the maturity of the grapes before picking.
Moreover, and as is often the case, competition seems to me in the end to be a positive force; Irancy wine producers work several parcels of vines and if in the past, the tendency was to assemble wines from a selection of grapes from these parcels, today we see a tendency to vinify parcels of vines separately, to accentuate the nuances in expression of each terroir: Palotte of course. But also Mazelots, Côte de Moutier, Paradis, Les Cailles etc…

Just how far one should favour these ‘cru’ wines at the risk of the less known? If the cult of excellence is largely a positive one it can also have some limitations. The average price must be representative of the appellation as a whole and it is the whole of the appellation which, in the end, should be appreciated. The debate is open and history is still being made in Irancy.

Jean-Luc Barnabet, 27 July 2015
http://www.jlbarnabet.com/[:]